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La plume d'Evy. Thème n°78.Balade au fil de l'eau. chloé
DÉFI N° 78 THÈME " BALADE
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Texte sur la maladie d' Alzheimer
Balade au fil de l’eau
A l’ombre d’un grand chêne où mon père l’avait installée en cette belle journée d’été, elle était là ma Madeleine, dans son beau fauteuil d’osier, le regard un peu perdu dans les méandres de ses pensées. Mon prénom s’était envolé mais quand je lui prenais la main, elle revenait un instant, me la serrant tendrement comme le fait une maman en retrouvant son enfant. Et comme tous les vendredis, nous refaisions le voyage de ses souvenirs passés, en allant au fil de l’eau, sur les bords de Seine, au temps où elle avait 20 ans et des étoiles plein les yeux. Elle m’embarquait avec elle, sous le pont de Mirabeau, retrouvant là les émois de ses amours de jeunesse, la poésie de Verlaine et l’âge d’or des guinguettes où sur les rives ombragées, elle aimait se retrouver avec Anna et Suzette. Je l’imaginais alors, avec ses cheveux bouclés flottant légèrement au vent, joliment endimanchée Aux sons de l’accordéon, je la regardais danser, insouciante, si légère et blotties l’une contre l’autre, je fredonnais avec elle, les amants de la St Jean ; le joli temps des cerises ou celui des rêves bleus, ces vieux airs oubliés qu’elle me chantait si souvent quand j’étais encore enfant. Dans cet instant si unique, l’espace de quelques refrains, plus proches encore qu’autrefois, nos cœurs se rejoignaient dans une tendresse infinie qui curieusement ici, n’avait pas besoin de mots.
Parfois au cours de nos voyages, nous partions sur l’île de Molène pour y rejoindre sa mère, la maison de son enfance et ses rires d’écolière. Je retrouvais mémé Louise affairée à ses fourneaux, les genoux de mon grand père qui me contait des histoires de marins, de baleiniers, au coin de la cheminée. Avec le vieux chien Cyrus, toujours là à mes côtés, Je respirais le grand air, l’odeur des algues séchées : surveillant l’heure des marées pour voir revenir au port, l’oncle Jean parti en mer, avec son grand chalutier. Je redécouvrais l’enfant, partie depuis si longtemps qui revenait au pays pour y passer tout l’été.
Aujourd’hui ma Madeleine dans son monde s’est envolée vers des contrées si lointaines que je ne peux y accéder. A l’ombre de son grand chêne, dans son beau fauteuil d’osier, quand je m’assois auprès d’elle, lui prends la main doucement en fredonnant ces vieux airs qu’elle me chantait si souvent, elle me revient un instant et nos cœurs se rejoignent dans une tendresse infinie qui n’a pas besoin de mots.
Chloé
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Commentaires
3maposieMardi 4 Octobre 2016 à 08:42Ce texte me fait penser à ma mère décédée
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Mardi 4 Octobre 2016 à 18:21
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J'ai pris le temps de lire plusieurs de tes poèmes et je les trouve excellents; ton blog est une belle découverte, la sensibilité de tes mots accordée à la richesse avec laquelle tu les images plonge immédiatement dans les 'histoires' que tu racontes et dessine avec finesse le portrait de tes 'personnages'...
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Bonjour Chloé, il est de ces maladies qui font tout perdre, toutes les notions, ses souvenirs et son identité, celle des autres même, alors de temps en temps quel bonheur de la retrouver ta Madeleine... ,-) bises
Oui des instants précieux! Bisous.Chloé